Tout sujet pratiquant la course à pied ne peut être qu’interpellé par la prévalence du hallux rigidus dans leur population, puisque les runners représenteraient jusqu’à 25% des patients touchés par cette arthrose du gros orteil. Quels sont donc les liens entre hallux rigidus et course à pied, et que faire pour ne pas être atteint ?
Hallux valgus et hallux rigidus : quelle différence ?
L’hallux est le terme médical désignant le gros orteil du pied, expliquant qu’on retrouve ce mot dans deux pathologies différentes :
- Le hallux valgus désigne une déviation du gros orteil dans le plan latéral, ce dernier se tournant vers l’intérieur du pied et les autres orteils ;
- Le hallux rigidus désigne, comme son nom l’indique une rigidité anormale de l’articulation, apparaissant dans un processus d’arthrose.
L’arthrose du gros orteil, ou hallux rigidus, correspond donc à une lésion dégénérative du cartilage articulaire, située au niveau de l’articulation métatarso-phalangienne du premier rayon. Les manifestations cliniques (déformation articulaire, douleurs du gros orteil, raideur et ankylose articulaire…) sont souvent similaires à celles rencontrées dans un hallux valgus, mais les causes et les traitements diffèrent. Il est fréquent que la douleur du hallux rigidus soit accentuée à l’effort, en particulier la marche ou la course à pied. C’est pourquoi toute douleur chronique du gros orteil au repos ou à l’effort doit amener le patient à consulter, de préférence un chirurgien spécialiste du pied et de la cheville.
Quelles sont les causes du hallux rigidus ?
Comme pour tout processus arthrosique, on sait que les microtraumatismes répétés jouent un rôle essentiel dans la dégénérescence du cartilage, avec très souvent un terrain génétique ou héréditaire favorable. D’autres facteurs favorisants sont aussi identifiés comme pouvant augmenter le risque d’arthrose, à l’instar de l’âge, de mauvaises chaussures, du surpoids, de déviations des membres jambes arquées…
Les chocs répétés induits par la course à pied pourraient donc exercer un rôle délétère sur l’articulation métatarso-phalangienne I. Qu’en est-il vraiment ?
Quels sont les effets de la course à pied sur le hallux rigidus ?
La course à pied type running exerce évidemment de nombreuses contraintes mécaniques sur le pied, l’ensemble pied / chaussures devant absorber l’énergie mécanique causée par l’impact des chocs. Il a été ainsi prouvé le rôle essentiel de la souplesse du pied le long de l’arc longitudinal médial, avec un mécanisme de ressort dû en partie au fascia plantaire, susceptible d’absorber jusqu’à 17 % de l’énergie d’une foulée. Les rayons osseux et les masses musculaires interviennent aussi. Plus la vitesse du runner augmente, plus l’énergie mécanique à dissiper croît, avec un risque de surcharge. Il existe ainsi de grandes différences d’un coureur à l’autre selon la qualité de déroulé du pied en marchant ou en courant. Le rôle des chaussures de course et de leur semelle reste aussi essentiel.
Les microtraumatismes répétés de la course à pied sont reconnus pour augmenter le risque d’arthrose, aboutissant à une usure prématurée du cartilage et à un risque de frottement des embouts osseux. Les contraintes mécaniques vont alors favoriser le développement de tissu osseux néo-formé, avec apparition des becs de perroquet ou ostéophytes. Ils participent à la raideur articulaire qui s’installe, typique du hallux rigidus. C’est alors un vrai cercle vicieux qui démarre : car cette rigidité fait perdre au pied sa souplesse, indispensable à une absorption de l’énergie mécanique.
Cartilage et os subissent donc des contraintes mécaniques de plus en plus importantes, auto-aggravant l’hallux rigidus.
Tout patient pratiquant la course à pied et ressentant des douleurs épisodiques du gros orteil a donc intérêt à consulter un chirurgien orthopédique spécialiste du pied et de la cheville. Ce dernier pourra vérifier les contraintes mécaniques s’exerçant sur l’articulation, et les éventuelles anomalies. Les détecter de manière précoce permet ainsi d’engager des mesures stratégiques optimales pour éviter une sollicitation excessive du gros orteil, et de retarder ainsi une éventuelle opération du hallux rigidus. Dans les cas les plus avancés de hallux rigidus, la course à pied doit être abandonnée au profit de sports plus doux, comme le vélo ou la natation, avec parfois la nécessité d’une opération du hallux rigidus effectuée de préférence par un chirurgien du pied et de la cheville de son choix.